Xavier Mariette : la quête de traitements pour guérir les maladies auto-immune

Portrait de chercheur ou chercheuse Article publié le 01 septembre 2024 , mis à jour le 17 décembre 2024

Xavier Mariette est chef du service d’immuno-rhumatologie à l’hôpital Bicêtre, professeur de rhumatologie à l’Université Paris-Saclay, et directeur de l’équipe Auto-immunité au sein du laboratoire Immunologie des maladies virales, auto-immunes, hématologiques et bactériennes (IMVA-HB – Univ. Paris-Saclay/Inserm/CEA). Il consacre sa carrière à l’étude des maladies auto-immunes et à la mise au point de nouveaux traitements.
 

34e Congrès Français de Rhumatologie

Xavier Mariette entame ses études de médecine en 1977 à l’Université Paris Descartes, où il découvre l’immunologie. En 1987, après son internat, il développe une passion pour la rhumatologie, attiré par l’examen clinique des patientes et patients et l’importance des mécanismes immunologiques dans les maladies immuno-rhumatologiques. « Les maladies auto-immunes, où le système immunitaire se retourne contre l’organisme, touchent près de 10 % de la population mondiale et représentent un défi majeur pour la santé publique. » De 1987 à 1989, il poursuit sa formation dans la clinique rhumatologique de l’hôpital Bicêtre. Pour approfondir ses connaissances en immunologie, il rejoint l’hôpital Saint-Louis où il réalise un DEA (l’équivalent aujourd’hui d’un master 2) puis une thèse de sciences. Il se spécialise dans l’étude des lymphocytes B et des auto-anticorps – des protéines sécrétées par des cellules inflammatoires qui attaquent les composants de l’organisme et entrainent diverses pathologies. Pendant dix ans, il travaille à l’hôpital Saint-Louis en tant que praticien hospitalier universitaire, puis maître de conférences en immunologie.

Comprendre les maladies auto-immunes

En 1999, Il revient à la rhumatologie, transformée par l’introduction des immunothérapies et des traitements anti-TNF (tumor necrosis factor) qui révolutionnent la prise en charge de la polyarthrite rhumatoïde et d’autres rhumatismes inflammatoires. Il rejoint alors l’Université Paris-Saclay (à l’époque Université Paris-Sud) en tant que professeur et chef de service à l’hôpital Bicêtre.

Ses premiers travaux de recherche portent alors sur une cytokine nouvellement découverte, la cytokine BAFF (B cell Activating Factor of the TNF Family). Cette protéine secrétée par les cellules du système immunitaire joue un rôle important dans l’activation des lymphocytes B auto-immuns, impliqués dans de nombreuses pathologies auto-immunes très variées. « Dans mon domaine, la polyarthrite rhumatoïde est la plus fréquente. Mais en neurologie, il y a la sclérose en plaques, en gastro-entérologie, la maladie de Crohn, et en endocrinologie, le diabète de type 1 chez l’enfant. » Le professeur se concentre sur la maladie rare de Sjögren qui se caractérise par une sécheresse des yeux et de la bouche due à l’infiltration de lymphocytes autour des glandes sécrétrices, des douleurs articulaires, des complications dans de nombreux organes et un risque accru d’un cancer des ganglions appelé lymphome. Dès son arrivée, Xavier Mariette prend l’initiative de développer un secteur de recherche clinique au sein de son service, où il introduit l’utilisation de biothérapies pour les rhumatismes inflammatoires et les maladies auto-immunes. En parallèle, il développe l’activité de recherche translationnelle du laboratoire Régulation de la réponse immune, VIH et auto-immunité. En 2003, avec son équipe, il met en évidence pour la première fois le rôle de la cytokine BAFF dans le développement de la maladie de Sjögren. « Cela a marqué un tournant décisif dans notre approche des maladies auto-immunes, ouvrant la voie à de nouvelles thérapies ciblées. » En effet, le Belimumab, un anticorps anti-BAFF utilisé depuis dix ans pour traiter le lupus — une maladie auto-immune caractérisée par des symptômes articulaires, cutanés et rénaux — et l’Ianalumab, un anticorps anti-BARR récepteur actuellement en développement, sont désormais consacrés au traitement du lupus et de la maladie de Sjögren.

En 2015, l’équipe de recherche de Xavier Mariette, dédiée aux maladies auto-immunes, s’autonomise et s’installe au centre de recherche en Immunologie des maladies virales, auto-immunes, hématologiques et bactériennes (IMVA-HB – Univ. Paris-Saclay/Inserm/CEA). Elle reçoit cette année-là le label FRM (Fondation pour la recherche médicale), renouvelé en 2023.

CARE : explorer le lien entre maladies auto-immunes et cancers

Un autre axe de recherche de Xavier Mariette concerne les liens étroits entre maladies auto-immunes et cancers. La maladie de Sjögren présente un risque accru de lymphomes et les immunothérapies anti-inflammatoires ont le potentiel d’augmenter le risque de cancer. À l’inverse, les traitements d’immunothérapie entrainent un risque important de maladies auto-immunes. Afin d’explorer cette relation bidirectionnelle, le professeur crée la fédération hospitalo-universitaire Cancer and autoimmunity relationships (CARE) en 2019. Elle réunit cliniciennes et cliniciens et chercheuses et chercheurs spécialisés en maladies auto-immunes et en cancérologie, et favorise la compréhension des mécanismes liant ces deux domaines. Fort de ce succès, un domaine d’intérêt majeur (DIM) de recherche voit le jour en 2022 grâce au soutien de la région Île-de-France et finance des appels à projets dédiés à cette thématique.

3D Rendering – Severe pain in the joints – Rheumatism and arthrosis

Un espoir de guérison grâce aux cellules CAR-T

Aujourd’hui, Xavier Mariette poursuit ses recherches avec l’objectif de développer de nouvelles stratégies thérapeutiques. Il explore notamment l’utilisation de cellules CAR-T ou d’anticorps bispécifiques, initialement utilisées dans le cas d’hémopathies malignes réfractaires. Étudier leur potentiel d’éradication des lymphocytes B responsables de maladies auto-immunes ouvre de nouvelles possibilités thérapeutiques. « Je rêve de parvenir à développer des traitements capables d’éradiquer définitivement les cellules responsables des maladies auto-immunes afin d’obtenir une guérison. » Cela offrirait aux patientes et patients une rémission durable sans dépendance à des médicaments aux effets secondaires potentiels, comme c’est le cas aujourd’hui. Pour toutes ses recherches, Xavier Mariette utilise le plus souvent des prélèvements issus de patientes et patients. « Grâce à l’association de la recherche clinique, des essais thérapeutiques et de la recherche translationnelle en laboratoire, nous améliorons la qualité et l’espérance de vie de ces personnes. »

Enseignement et présidence du conseil scientifique

Parallèlement à ses activités de recherche, Xavier Mariette s’investit dans l’enseignement et la formation des jeunes chercheuses et chercheurs en rhumatologie et immunologie. Depuis une décennie, il assume aussi la présidence du conseil scientifique de la faculté de médecine de l’Université Paris-Saclay. Son rôle consiste à faciliter l’intégration des personnels hospitalo-universitaires dans les équipes de recherche, à encourager l’arrivée de nouvelles équipes et à stimuler les interactions entre les 24 unités de recherche de la faculté de médecine de l’Université et les autres disciplines.

Des distinctions prestigieuses

L’excellence de ses recherches valent à Xavier Mariette de nombreuses récompenses. En 2017, il reçoit le prix Guillaumat-Piel de la Fondation pour la recherche médicale, qui valorise les chercheuses et chercheurs dans le domaine des maladies ostéoarticulaires et les maladies du sang. En 2023, il fait partie des Highly Cited Researchers distingués par Clarivate Analytics, qui le classe parmi les 1 % des scientifiques les plus cités en médecine. « Je suis fier de cette distinction, car elle est assez rare et témoigne de la reconnaissance de mon travail par mes pairs. » Ces reconnaissances individuelles s’accompagnent de reconnaissances collectives : son équipe est récompensée en 2015 et en 2023 par la Fondation pour la recherche médicale, qui souligne ainsi l’excellence de ses travaux.